Yaoundé pose les bases d’une gestion innovante, entre valorisation des déchets et création d’emplois verts
« Nous devons cesser de voir les déchets comme un fléau, mais plutôt comme une ressource stratégique. » Par ces mots percutants, Célestine Ketcha Courtès, ministre de l’Habitat et du Développement urbain (MINHDU), a ouvert les États généraux sur la gestion des déchets urbains, tenus les 6 et 7 mai dans la capitale camerounaise. Un événement politique et symbolique, placé sous le haut patronage du Premier ministre, visant à rompre avec les solutions éphémères pour inscrire cette question dans une vision systémique et territoriale.
Urgence sanitaire, opportunité économique
Le constat est sans appel : moins de 50 % des déchets sont collectés à Yaoundé, 30 % à Douala, tandis que les dépotoirs anarchiques prolifèrent. Face à cette insalubrité chronique responsable de pollution atmosphérique, d’inondations et de risques sanitaires , la ministre, envoyée spéciale du chef du gouvernement, a rappelé la directive présidentielle : « Trouver en urgence une solution pérenne. »
Mais l’enjeu dépasse la salubrité. Il s’agit d’opérer un changement de paradigme : passer d’un traitement curatif à une logique préventive, intégrant l’économie circulaire. Trois axes structurent cette feuille de route : réforme de la gouvernance du secteur, développement d’infrastructures de collecte et de traitement, et valorisation des déchets pour générer des emplois verts.
Décentralisation et innovation : les clés du modèle camerounais
Les travaux ont mis en lumière des pistes concrètes. Parmi elles, la professionnalisation de la filière, via des mécanismes incitatifs pour les collectivités locales et le financement de projets à forte valeur écologique ajoutée. L’exemple de Dschang, commune pionnière dans la transformation des déchets organiques en compost, a été érigé en modèle. « La décentralisation peut être un moteur de solutions adaptées aux réalités locales », a souligné un expert présent.
Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), représenté par Opia Mensah Kumah, a promis un accompagnement technique et un renforcement des capacités. Un signal fort, alors que le Cameroun ambitionne de devenir un exemple africain de gestion intelligente des déchets.
Vers un cadre réglementaire rénové
Les résolutions issues de ces États généraux devraient aboutir à un arsenal législatif modernisé, intégrant justice environnementale et innovations sociales. Objectif : bâtir des villes « propres, résilientes et durables », selon les termes de la ministre Ketcha Courtès.
En filigrane, une conviction : transformer les 53 000 tonnes de déchets évacués lors des récentes opérations « coup de poing » en ressources pourrait allier écologie et inclusion économique. Un défi à la mesure de l’urgence climatique, mais aussi des attentes d’une population jeune en quête d’opportunités.