Cinq ans après le drame de Ngarbuh, où des forces gouvernementales ont été impliquées dans la mort d’au moins 23 civils, dont des femmes enceintes et des enfants, la justice peine encore à rendre son verdict.
Le procès des accusés, entamé en 2020 devant le tribunal militaire de Yaoundé, est toujours en cours, marqué par de nombreux reports et irrégularités.
Un crime reconnu, mais une justice au ralenti
Le 14 février 2020, le village de Ngarbuh, situé dans la région du Nord-Ouest, a été le théâtre d’un massacre attribué aux forces armées camerounaises. Après avoir initialement nié toute implication, le gouvernement a finalement reconnu la responsabilité de certains soldats, qui ont été suspendus et déférés devant la justice.
Malgré cette reconnaissance, le processus judiciaire n’a cessé de s’enliser. Depuis l’ouverture du procès en décembre 2020, les audiences ont été régulièrement reportées pour diverses raisons, notamment l’absence des juges et d’autres membres du tribunal. À ce jour, aucune condamnation définitive n’a été prononcée.
Des irrégularités dénoncées
Human Rights Watch (HRW) dénonce une procédure opaque et défaillante. Selon l’ONG, les familles des victimes ont été largement tenues à l’écart du processus et n’ont pas eu un accès significatif aux audiences. Pire encore, des éléments de preuve cruciaux, comme des certificats de décès, n’ont pas été admis par le tribunal.
De plus, si certains soldats ont été poursuivis, les officiers supérieurs impliqués dans cette opération n’ont, pour l’instant, ni été inculpés ni arrêtés. Par ailleurs, 17 miliciens peuls suspectés d’avoir participé à l’attaque restent en liberté, ce qui renforce le sentiment d’impunité.
Un espoir ténu pour les familles des victimes
La dernière audience s’est tenue le 17 octobre 2024, et la prochaine est prévue pour le 20 février 2025. Toutefois, les multiples reports et l’absence de véritables avancées suscitent le doute quant à la volonté réelle des autorités de rendre justice.
« Le rythme glacial des procédures amène les familles des victimes à se demander si justice sera un jour rendue. Le procès Ngarbuh est une opportunité pour le gouvernement de prouver qu’il peut tenir ses responsables pour comptables de leurs actes », souligne HRW.
Le massacre de Ngarbuh demeure l’un des épisodes les plus sombres du conflit en cours dans les régions anglophones du Cameroun. Cinq ans après, les survivants et les familles des victimes attendent toujours que justice soit faite. La question demeure : le système judiciaire camerounais saura-t-il répondre aux attentes et rompre avec l’impunité ?